Sale crevarde,
Tu m'as chopée par les tripes, et ne me lâche pas : passive, je dois supporter tes cisaillements de chair, tes rappels insistants en pleine nuit, et cette douleur sourde, triturante des viscères révulsées. Envies de vomi qui ne vient pas, sueurs froides, la torture est ton art sublime, grande prêtresse de la souffrance !
Et lorsque, quelques heures, tu laisses ta victime respirer en paix, ce n'est que ruse : on dit que le bourreau laisse ainsi reposer le supplicié, dans l'illusion de la paix retrouvée, pour mieux jouir de son désespoir quand il revient le soumettre à la question.
Je crois que je préfère infiniment la mort à la souffrance : car il est des morts simples et immédiates, instantanées, comme la balle qui détruit le cerveau ou certains accidents de voiture : j'ai déjà été victime (légère) d'un accident routier, me réveillant un quart d'heure après le choc, nez en sang, assise sur le talus, alors qu'on attendait les pompiers : 15 minutes, m'a-t-on dit, d'inconscience totale. Au lieu d'évanouie, j'aurais pu aussi bien être morte. Pour moi, c'eût été du pareil au même ! La mort n'est pas forcément liée à la souffrance physique . Et cette mort, imposée à tous, paraît inscrite dans le cycle inéluctable de la nature, comme "normale" pour tout être vivant.
Tandis que la souffrance, elle, semble inutile, de trop.
Sentir que "çà fait mal" quand on approche la main du feu, et ainsi averti, éviter plus grave : cette douleur parait alors un signal d'alarme, utile à l'imprudent. Mais pour un instant de douleur "utile", combien de souffrances transforment la nature en un immense tortionnaire !
Et dire que l'homme n'a de cesse de l'imiter, cette nature cruelle !
Lâche-moi au moins cette nuit, crevarde, que je dorme en paix...
(Incantation vaine !)
Il n'y a pas longtemps, une copine d'une copine m'a parlé du copain d'un gars qu'elle connaissait (euh, faut suivre...) et ce gars-là, il ne sentait ni la faim, ni la douleur. Il savait qu'il devait manger, mais il n'en n'avait pas envie...
C'est dans ces moments-là que je me rends compte qu'il y a des gens qui souffrent beaucoup plus que moi...
Alors je ne peux que te souhaiter du courage, et encore du courage et plein de courage... Et je t'envoie des ondes d'amitié de ma Bretagne... Allez, hop, par dessus les mers !!!
Bisous :)