Chevrette Nomade

Il y a un an

Il ne se passait rien...

Mardi 29 septembre 2009 à 19:58

Cet article m'est inspiré par le suicide de Nelly Arcan, ici
Le suicide, consciemment réfléchi, préparé et voulu, me trouble beaucoup.
Vous le voyez, je "limite" bien dans cette 1ère phrase le domaine de ma réflexion.
J'exclus les suicides de "faiblesse", ceux provoqués par une souffrance physique trop intense, ou la douleur psychologique brutale provoquée par une rupture brutale d'amour, le deuil insupportable de parents qui voient partir accidentellement leur enfant... ou autres.
Ces suicides-là, je les "comprends"... ("comprendre", mot pourtant peu légitime, à mon avis, tant qu'on n'a pas "subi" la souffrance qui a mené à l'acte suicidaire...  Rares sont ceux à qui j'ose dire "je te comprends" : j'aurais trop l'impression de mentir !)
Si je parle ici de ce thème, le suicide, c'est parce qu'à côté de "chez nous", une écrivaine célèbre, encore jeune (36 ans), nominée pour les prix Femina (2 fois) et Médicis (1 fois), s'est suicidée il y a 5 jours (25 Septembre).
Sur elle reposaient donc tous les espoirs d'une ascension sociale en tant que femme de lettres. Même si le titre de ses 2 livres les plus connus ("Putain" et "Folle") inquiète et trouble. Autant que le titre (prémonitoire ?) de son roman à paraître : "Paradis clef en main"...
 Elle a financé ses études de lettres ici à Montréal en étant "escort-girl" (on dit seulement ici "escorte"). Probablement une "job" qui marque le corps et le coeur. (Une "escorte" n'est pas seulement une fille qui fait visiter Montréal à des clients : elle doit aussi souvent faire visiter son corps ! Un moyen de "payer" frais d'études ou logement pas si rare !). Elle veillait beaucoup à sa présentation physique, et pratiquait dans une salle de gym proche d'ici.
Comment peut-on, quand on est connue, respectée et belle, se suicider en plein "force de l'âge" ?
J'ai personnellement eu bien trop peur de mourir, entre 12 à 15 ans, pour avoir jamais eu idée de me suicider !
Mais je rencontre des gens de mon âge qui, parfois, semblent prêts à envisager de tout arrêter entre 18 et 25 ans. Ce n'est jamais clairement énoncé, mais on sent une rupture d'équilibre, comme une tentation.
C'est rarement une question de "misère économique"... les statistiques montrent d'ailleurs qu'on se suicide plus dans les pays riches que dans les pays pauvres, plus en période de paix que de guerre.
J'ai parfois l'impression que ce qui manque, c'est la "rage de vivre", une envie guidée par un idéal, une ambition ou autre...
Notre monde, ou plutôt l'image qu'en donnent les médias, est artificiel, souvent ridicule.
Les adultes nous semblent souvent limiter leur ambition à des objets prestigieux de "confort" : maison, bagnole, piscine, etc...
http://maud96.cowblog.fr/images/imgdelete.pngJeunes, nous sommes parfois "extralucides" : nous nous voyons déjà, comme certains vieillards que nous connaissons, en fin de vie ! décrépits, diminués, impotents... et nous nous disons : "à quoi bon vivre pour en arriver là !" Je le lis parfois dans des blogs.
Il y a aussi nos rêves brisés dès la sortie du lycée : telle filière ne veut pas de nous, des places manquent dans telle école, des prépa qui nous obligent à nous réorienter, des amphis ennuyeux bien loin de notre "projet personnel"... et simplement lassitude, transports, mal-bouffe, vie seule dans une piaule... et la nostalgie du "groupe-lycée", souvent chaud et convivial, qui nous manque tant...
Bref, on peut analyser à l'infini cet ennui de vivre. Pourtant Europe, Amérique du Nord, d'où je parle, sont, avec d'autres zones du monde, relativement calmes et aisées.Dans ces zones, il s'agit moins de misère que d'une "lassitude de vivre" qui peut mener au suicide,
Je la ressens comme une "faiblesse" inhérente à  notre mode de civilisation. Une sorte d'ennui.
De manière ou d'autre, il nous faut recréer l'aventure au sein de nos vies, pour casser cette routine.
C'est quand on trouve la vie ennuyeuse que, comme pour un film "navet", la tentation nous prend de quitter la salle.
Une citation du philosophe Sénèque illustre bien mon propos :
"Certains en ont assez de faire et de voir les mêmes choses et ont pour la vie non de la haine, mais du dégoût. C'est sur cette pente que nous pousse la philosophie quand nous disons : "Jusqu'à quand la même routine ? Vais-je encore m'éveiller, dormir, avoir faim, me remplir, avoir froid, avoir chaud. Rien ne connaît de fin; au contraire, dans le monde, tous les éléments s'écoulent et s'enchaînent. La nuit chasse le jour, le jour chasse la nuit, l'été s'achève à l'automne, l'automne est pressé par l'hiver qui s'évanouit devant le printemps; tout passe de manière à revenir. Je ne fais rien de neuf, je ne vois rien de nouveau : cela donne quelquefois la nausée." Nombreux sont ceux qui ne jugent pas la vie pénible, mais superflue. Salut."
SÉNÈQUE, Lettres à Luc., III, 24, 25-26.
Par Tote le Mardi 29 septembre 2009 à 20:17
Et d'autres veulent se suicider par "mode" et par "manque de reconnaissance". Je ne sais pas si tu as entendu cette histoire de quelques copains qui se sont suicidés collectivement car un de leur camarade décédé a eu, par ses amis, un skyblog lui étant dédié. Ils ont voulu à leur tour qu'on leur consacre un blog et c'est là leur seul motif de suicide. Du moins d'après les médias... Et bien je pense que ce comportement provient surtout d'un sérieux défaut mental. A mon avis ce genre de personnes ont des problèmes psychologiques qu'il faut résoudre...
Par Lady.Dylan le Mardi 29 septembre 2009 à 20:19
L'ennui de vivre, la perte de l'envie.

Voilà, c'est tellement ça.

(Dans le même genre que ton illustration, j'avais vu une image où un serpent s'était pendu avec son propre corps et un autre serpent "no, eliott, why ?")
Par monochrome.dream le Mardi 29 septembre 2009 à 20:46
Parce que même un lassé de la vie possède un instinct de conservation, j'ai l'impression qu'il faut en plus de l'ennui une émotion/douleur/pression à vif pour oser tenter le geste... quelque chose de plus fort que la peur de mourir, qui soit si évident et brûlant que la seule échappatoire possible devienne la mort.
Par le-grand-duduche le Mardi 29 septembre 2009 à 21:43
Je suis surtout d'accord avec toi dans la première partie de ton article. En effet, je pense qu'on ne peut pas forcément comprendre cette attitude et certaines souffrances peuvent certainement devenir invivable. Partant de là, je ne juge en aucun cas les gens qui pensent ou qui passent à l'acte.
Par maud96 le Mardi 29 septembre 2009 à 21:43
Je suis assez d'accord : il doit toujours y avoir un élément provocateur, rupture amoureuse, dispute, ou "drogue" mal assumée pour qu'on passe à l'acte. Le "spleen" en soi ne suffit pas...
Par maud96 le Mardi 29 septembre 2009 à 21:45
Je ne connaissais pas cette histoire, Tote... et elle paraît assez étonnante en effet, même si j'avais entendu parler de suicides en groupe d'adolescents !
Par Anarion le Mercredi 30 septembre 2009 à 13:05
Oui, les suicides de groupe... En tous cas, c'est un sujet très compliqué il me semble. C'est encore tabou de parler de suicide dans nos sociétés et parfois, ""effet de mode entre ados"" ? Je ne sais pas...
Par Paskale le Mercredi 30 septembre 2009 à 15:04
"qu'est ce qui demande le plus de courage, la vie ou la mort?"

je n'ai pas la réponse, à vrai dire, mais le suicide hante de plus en plus de gens...
Par silverthorn le Mercredi 30 septembre 2009 à 17:57
"Comprendre" c'est "prendre avec soi", il me semble donc que tu n'as pas à rougir en disant que tu "comprends" le suicide.

À une époque où je m'étais retrouvé à discuter avec une personne ayant des pensées suicidaires, je m'étais intéressé à la question, retenant du même coup une citation de Nietzsche, que je trouve toujours éclairante :
« La pensée du suicide est une puissante consolation : elle nous aide à passer maintes mauvaises nuits. »
Par alesia le Mercredi 30 septembre 2009 à 19:58
je ne crois pas qu'il s'agisse "juste" d'un ennui. C'est bien plus fort que ça, je suis d'accord avec monochrome.dream. Je pense que on en vient à penser à ça lorsqu'on n'a plus aucun espoir. Dans ce cas, avant de passer à l'acte, il faut essayer de rationaliser, et se dire "j'attends encore un peu, pr voir si les choses ne vont pas s'améliorer". Cette "philosophie" m'a aidé à tenir à une période de ma vie.. Et les choses ont vraiment fini par s'améliorer :D
Par imparfaiite le Mercredi 30 septembre 2009 à 20:46
Je trouve ton article vraiment intéressant. Lors de ma crise d'existencialisme adolescente j'ai vraiment pensé au suicide. Et puis, j'ai regardé les choses et je me suis dis que je n'avais pas le droit. Au nom de la vie, au nom des autres. Depuis, dès que ces pensées m'assaillent,je me rappelle de la promesse que je m'étais faite. Je suis d'accord avec tous ceux qui dise qu'il faut plus qu'un spleen pour se suicider et que souvent, c'est une douleur, un choc qui fait déclic, mais un ennui du quotidien est un quelque qui ronge et qui ronge. un de mes pires ennemis. Alors, réouvrir ses yeux chaque jour avec une regard nouveau et la poésie, et la littérature, et les autres ... pour nous aider à réinventer notre quotidien.
Par repermusiques le Jeudi 1er octobre 2009 à 8:25
Merci d'être passée :) Ce qui me démoralise c'est d'entendre sur France-Info les suppressions de poste à l'Education nationale, entre autres... Mais bon, il faut se battre et avancer ! Même avec les TCL en grève ^^

A bientôt :)
Par May* le Jeudi 1er octobre 2009 à 14:44
Cette histoire de l'écrivaine me touche beaucoup. Je n'avais pas entendu parler de son suicide. Je ne sais pas quoi penser, quoi dire, quoi rajouter. C'est triste, oui. C'est sur.
Mais bon, si je puis dire " c'est la vie".
Par Loude's le Vendredi 2 octobre 2009 à 0:07
hum, j'ai du enterré y'a quatre mois de cela, mon jeune voisin et ami de 17ans. Suicide. Disons que ca fait enormement réflechir.
Par que-vent-emporte le Samedi 3 octobre 2009 à 9:50
Parfois, on se dit : mais la vie n'est pourtant pas si mauvaise, si ennuyeuse que ça ! La vie non. Mais là ce n'est pas la vie qui est en cause. Il ne s'agit pas d'un divorce entre soi et la vie, mais d'un divorce profond et irrémédiable à l'intérieur de soi.
Je suis surpris soudain de la gravité de tes articles. Maud, attention à toi, ne charge pas trop ta barque.
Par Plume le Mardi 6 octobre 2009 à 17:26
Il existe des tas, et des tas de raisons qui peuvent conduire quelqu'un au suicide.
Mais c'est sûr que la lassitude de la vie... enfin je pense qu'il est toujours possible de prendre sa vie en main et de faire changer les choses. Mais je suppose que je pense ça parce que j'ai survécu à ma propre tentative de suicide^^.
Par Dream.catch.me le Mardi 6 octobre 2009 à 19:53
Le suicide n'est pas aussi raisonnable que ce que tu décris.
Les suicides découlent tous d'un processus long et vicieux. Ca n'arrive pas du jour au lendemain et les personnes qui en arrivent là n'ont plus la même capacité de réflexion que toi et moi, il sont dans un cercle vicieux où ils perdent petit à petit tout repère au point d'en arriver à un moment où la mort devient la seule solution possible là où n'importe qui d'autre aurait fait un choix plus raisonnable et beaucoup moins extrême (exemple à propos de l'actualité : les salariés de France Telecom auraient pu démissionner au lieu de se donner la mort mais l'état mental dans lequel ils étaient ne leur permettait simplement pas d'y penser). Après, les suicides sont un comportement psychologique très compliqué, il en existe plusieurs types, et ce n'est pas encore compris à 100% alors on ne peut pas vraiment expliquer ces gestes. En tout cas c'est toujours triste et vaut mieux réfléchir à la vie qu'à la mort si tu veux mon avis =3
Par lacassepied le Mercredi 7 octobre 2009 à 20:01
L'image "quitter la salle" représente parfaitement ce que l'on ressent lorsqu'on veut en finir. On quitte la salle en jetant un dernier regard sur ceux qui restent face à l'écran.
Cependant je ne suis pas d'accord sur le fait qu'il faille un élément déclencheur. C'est une question de réflexion. On observe, et on se sent pas à sa place dans cette société, c'est simplement ça. On est un élément extérieur, et vivre devient absurde. C'est dur. Même quand on s'en "remet", on se sent différent. Tout à définitivement un goût amer.
Par invidia le Vendredi 16 octobre 2009 à 15:32
Comme il a été dit dans d'autres commentaires, il faut plus qu'une simple lassitude pour vouloir se suicider. On peut ajouter à cela une impression de ne pas avoir de futur avec les questions récurrantes "pourquoi suis-je né ? Dans quel but j'existe ?" ou le sentiment que quoi que l'on fasse/dise de toute façon ça n'aura aucun intérêt. On peut vouloir se suicider même sans rupture amoureuse (le fait que tu l'ai marqué deux fois - j'avoue - m'a agacé, comme si "l'amour" était plus important que beaucoup d'autres choses), je veux dire l'amitié et les soucis de ce côté-là peuvent jouer un rôle. On peut se sentir abandonné (faussement ou non) par ses amis ou sa famille, et donc avoir le sentiment de ne rien valoir d'où le suicide.
Fin bref, jpeux trouver des tonnes de raison de vouloir en finir... je m'en trouve toujours quand je déprime (soit.. très régulièrement)
 

crottes de chevrette

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